GÉNÉRALITÉS APPROCHE THÉÂTRALE
Ces conseils sur l'approche théâtrale avec des enfants sont parus dans plusieurs ouvrages aux éditions Scolavox et Bourrelier depuis de nombreuses années. Ces ouvrages n'étant plus disponibles, voici le contenu qui pourra vous être utile.
J'avais rédigé ces conseils pour les enseignants ; ils sont bien sûr valables pour les animateurs d'ateliers de théâtre ou autre lieux.
Bonne lecture... et bons spectacles ! Ann Rocard
BOURRELIER éducation / SCOLAVOX / BSSL (diffusion scolaire)
• «Théâtre à l’affiche 1» 1992
• « Théâtre à l’affiche 2 » 1993
• « Marionnettes à l’affiche » (petites pièces pour marionnettes ou acteurs, conseils pour l’enseignant) 1995 – Illustrations de jeanne Parello-Marneix.
• « 5 nouvelles pièces, théâtre à l’affiche » 1995 - Illustrations de Naïk Steunou.
• « La ronde des couleurs » 1997 (histoire, comptines, etc. + conseils pour l’enseignant) + CD (comédie musicale) avec musiques et arrangements de Gérard Legoupil – Illustrations de Naïk Steunou (+ diapos d’illustrations en couleur).
« L'Histoire entre en scène» (classeur pédagogique 2008 – niveau cycle 3, pièces, exploitation lecture-écriture, conseils pour l’enseignant) avec Nathalie Dupont, enseignante-chercheuse à l'université de Caen. Illustrations de Jeanne Parello-Marneix
« Quand le rideau se lève » (classeur pédagogique 2002 – niveau primaire, pièces, exploitation lecture-écriture, conseils pour l’enseignant) Illustrations de Jeanne Parello-Marneix
« Au four et au moulin» (classeur pédagogique 2012 – niveau CM, exploitation lecture-écriture, conseils pour l’enseignant) avec Nathalie Dupont, enseignante-chercheuse à l'université de Caen. Illustrations de Bruno Gibert
Vive le théâtre !
1. Théâtre généralités
Qu’apporte le théâtre ? Les bienfaits de l’activité théâtrale sont fort nombreux. Voici une liste non exhaustive des points principaux. - Maîtrise du corps, des gestes, des déplacements, de la voix. - Verbalisation, oralisation, permettant une meilleure maîtrise de la langue. - Mémorisation. - Repérage dans le temps (déroulement de l’histoire de la pièce, début et fin pour chaque improvisation - il faut trouver une chute ce qui n’est pas simple) et repérage dans l’espace (espace scénique réel et espaces virtuels de la pièce). - Socialisation (tenir compte des autres, de leur position, de leurs réactions...) - Valorisation de certains aspects de la personnalité (par exemple pour des enfants en échec scolaire, d’autres très timides), meilleure confiance en soi. - Extériorisation de certains conflits, souhaits... Attention : ne pas tomber dans le psychodrame ! Il faut rester vigilant.
Le jeu dramatique est utilisé dans le cadre de psychothérapies. Il se nomme alors théâtrothérapie et il est suivi par des spécialistes. Les animateurs non thérapeutes risquent de laisser les enfants exprimer des sentiments profonds déstabilisants pour eux et pour le groupe, sans pour autant savoir les aider à modifier leurs comportements dans le sens d’une meilleure adaptation à la réalité. C’est pourquoi, le jeu dramatique spontané doit être de courte durée, l’enseignant étant prêt à intervenir en cas de signe de dérapage imminent. Précision : l’auteur, qui est aussi psychologue pour enfants, ne pratique pas de théâtrothérapie dans le cadre des cours de théâtre qu’elle anime depuis de très nombreuses années. Un atelier théâtre permet à l’enfant de progresser de multiples façons, mais il ne s’agit pas d’une activité à but thérapeutique. L’atout premier dans ce type d’atelier doit être la passion du théâtre... car les passions sont contagieuses !
La langue, vecteur de bagage culturel. Aujourd’hui, le bagage culturel de la langue est de plus en plus délaissé. Celui-ci n’apparaît que très peu dans les médias. Il faut avouer que la plupart des séries télévisées et dessins animés proviennent de l’étranger ; la langue est donc traduite, souvent vidée de sa substance. Il est important d’expliquer le texte lui-même (les expressions, les jeux de mots, les références culturelles) pour que les enfants puissent mieux les comprendre, les apprécier (ils savourent ensuite les jeux de mots comme des bonbons !) et les réutiliser. Les jeux de mots permettent en effet une initiation à une lecture non linéaire. On appréhende le mot, la phrase, “au pied de la lettre” ou au contraire avec un certain recul. Le théâtre se prête aussi à la parodie. Sous ce terme peu familier se cache une notion que les enfants connaissent bien, car ils ont l’habitude de voir à la télévision des imitateurs ou marionnettes représentant chanteurs, hommes politiques, etc.
2. Théâtre mode d’emploi
L’exploitation des pièces Que les pièces soient courtes ou longues, nous proposons deux types de démarche. L’enseignant privilégiera l’une ou l’autre selon qu’il souhaite aborder la pièce par découverte orale sans appui du texte (approche orale) ou par la lecture directe du texte de la pièce.
L’APPROCHE ORALE L’enseignant gère la découverte du texte de la pièce.
Premier temps... Découverte sans le texte en main. Pour la plupart des enfants, l’approche de la pièce se fera oralement. Les enfants n’ont pas le texte en main. L’enseignant dit alors chaque phrase (ou partie de phrase) avec le ton, phrase accompagnée de gestes, mimiques, déplacements, etc. Il montre du doigt ou se tourne vers le ou les enfants qui doivent répéter la phrase en question. Au cours de cette approche, il est bon d’alterner les rôles ; que chacun puisse jouer différents personnages ou animaux. Chaque scène ou passage de pièce est repris ainsi de nombreuses fois ; peu à peu, le texte et le déroulement de chaque scène sont assimilés. Suivra ensuite l’éventuelle réalisation d’une bande son (voir plus loin). Les enfants les plus âgés peuvent ensuite répéter les scènes par petits groupes, sous le regard attentif... mais distant de l’enseignant.
Deuxième temps... L’apprentissage du texte. Après cette première approche, l’apprentissage du texte (scène par scène) peut se faire individuellement à la maison ou à l’école, comme pour une poésie, mais en bougeant ! Les enfants révisent donc les passages déjà travaillés en classe. Attention : au bout d’un moment, certains acteurs connaissent tous les rôles par cœur et ils ne peuvent pas s’empêcher de bouger les lèvres. De loin, les spectateurs ne savent pas bien qui est en train de parler ! Le texte étant mémorisé, les enfants accèdent à un niveau de langue beaucoup plus élaboré que le langage courant. Les linguistes distinguent le langage (capacité) et les langues (moyens d’expression de ce langage). En effet, il est important de faire découvrir aux enfants la distinction qui existe entre langue parlée (par exemple « Où tu vas ? » ou « Tu vas où ? ») et langue écrite (« Où vas-tu ? »). Dans la mesure du possible, ce deuxième type de langue est utilisé dans les pièces et repris oralement. Le théâtre permet donc d’établir un pont entre ces deux niveaux de langue.
LA LECTURE SILENCIEUSE OU À VOIX HAUTE
Premier temps Une scène peut être proposée en tant que texte à lire silencieusement. Soulignons que la lecture silencieuse d’un texte théâtral est difficile. Un conseil, même pour les bons lecteurs : alterner les deux types d’approche... et ne jamais jouer en lisant le texte (les acteurs ne pensent plus à utiliser leur corps et leur visage). Cette lecture peut aussi se faire à voix haute (toute la classe ou par petits groupes), chaque rôle étant tenu par un enfant ou par plusieurs enfants successivement.
Deuxième temps Il s’agit de trouver le fil conducteur, la trame de l’histoire. Le tracé suivant est dessiné sur une grande feuille ou sur le tableau. Les enfants le complètent avec des mots ou de petits dessins.
Ils répondent également aux questions suivantes (oralement ou par écrit). • Quels sont les autres personnages de l’histoire ? À quel moment interviennent-ils ? (réponses à noter sur le schéma au fur et à mesure)
• Quels sont les événements importants, les changements dans le rythme de la pièce, éventuellement les numéros des scènes ? (à noter également sur le schéma)
Début: Où se passe l’histoire ? (ex. château) Quand ? (époque, moment de la journée...) Qui est là, au début ?
Fin : Où se termine l’histoire ? Quand ? (durée de l’histoire) Qui est là, à la fin de la pièce ? (personnages, animaux, etc.) Quelle est la phrase finale ? Danse ou geste final ?
Les enfants peuvent entourer des passages du texte, souligner des mots, etc. avec des couleurs différentes. Ils doivent repérer les points importants de la pièce qu’ils font apparaître sur le fil conducteur.
Quand l’enfant connaît le rôle qu’il va jouer, il surligne d’une couleur le texte qu’il doit dire, d’une autre couleur les didascalies qui le concernent.
3. Pistes de travail théâtral
Ces pistes correspondent à des activités préalables à la mise en place des pièces ou sketches. Elles doivent être toutes utilisées régulièrement pour permettre aux enfants d’assimiler les différents aspects.
• La respiration. En position allongée, bras le long du corps sans toucher ses voisins, yeux fermés. Se concentrer sur le va-et-vient de l’air. L’enseignant explique en montrant comment faire : « On respire en gonflant le ventre comme un ballon. On souffle sans bruit et on vide l’air au maximum... Le ventre devient tout plat. Quand on souffle, on envoie à l’extérieur tout ce qui ne va pas en nous : si l’on est triste, si l’on n’a pas le moral, si l’on a mal quelque part, si l’on est fatigué, si on a peur ou si l’on a le trac, si l’on est en colère, etc. » Comparer l’air qui pénètre dans le corps à une vague qui va et vient, qui entre par la bouche et descend jusqu’aux pieds avant de remonter, puis la vague va jusqu’aux doigts, elle tourbillonne dans l tête avant de ressortir...
• La relaxation. En respirant comme ci-dessus, les enfants écoutent l’enseignant ou l’animateur. Ils doivent sentir les différentes parties de leur corps : sensations variées et successives (lourdeur, légèreté, chaleur, froid, bien-être). Par exemple : le corps est lourd, la tête s’enfonce dans le sol... Les pieds sont chauds et rouges, ou bien froids et bleus... puis ils redeviennent normaux. L’enseignant précise : « Bien sûr, on fait semblant. On imagine tout cela dans notre tête, sans bouger, en continuant de respirer en gonflant le ventre. » L’enseignant raconte une histoire courte que l’enfant vit sans le moindre mouvement : il imagine par exemple (“dans sa tête“) qu’il s’élève vers le ciel, qu’il est allongé sur un nuage moelleux, qu’il survole montagne enneigée, désert brûlant... qu’il plonge dans la mer et nage entre les poissons, etc. L’histoire est toujours associée à des sensations corporelles.
• À la suite d’une histoire racontée... Ouvrir les yeux dans un endroit inconnu, sans s’occuper des autres. L’enseignant continue à raconter une histoire et les enfants jouent, miment — cette fois-ci réellement — avec leur corps, leur visage, leurs yeux, leurs oreilles, leur nez, leurs mains... Découverte de l’endroit inconnu qui peut être une grotte, un tunnel, une forêt, une pièce, un bâtiment, une planète, etc. À la fin de l’histoire, l’enseignant dit par exemple : « On s’assied lentement, on ferme les yeux, on respire avec le ventre... Puis on ouvre les yeux et on se retrouve ici bien tranquillement. On se sent vraiment bien. »
• Investir l’espace. Marcher dans toute la pièce, dans un premier temps sans s’occuper des autres. Apprendre à utiliser tout l’espace disponible, aller toucher les murs, explorer les recoins...
• S’entraîner à utiliser les différentes parties du corps de façon indépendante (par exemple sur un enregistrement de rythme africain). L’enseignant joue le chef d’orchestre ; il explique au fur et à mesure tout en le faisant : « On est immobile, debout, les pieds collés au sol. En rythme, on bouge les yeux, puis la bouche, la tête, puis les doigts d’une main, de l’autre main, puis les poignets, les coudes, puis un bras, l’autre bras, les épaules, le dos, le ventre, les fesses, puis on plie un genou, l’autre genou, puis on décolle un pied, l’autre pied. On doit sentir chaque mouvement, se concentrer dessus. » « On bouge comme un pantin dans tous les sens, en s’imprégnant du rythme. Ensuite, un pied se colle au plancher, l’autre pied, puis une jambe s’immobilise, l’autre jambe, etc. en continuant à bouger les autres parties du corps. » À la fin, seuls les yeux bougent et l’enseignant précise : « C’est très important, les yeux ! Quand on entend un bruit, on regarde dans la direction d’où vient ce bruit. Au théâtre, quand on veut faire croire au public qu’il y a un bruit, on agit de la même façon. Au théâtre, on regarde celui qui parle et celui à qui l’on parle (sauf avec les très bons acteurs — pour que les spectateurs comprennent ce qui se passe). Avec les yeux, on peut exprimer beaucoup de choses, comme la peur en les écarquillant au maximum... » Enfin, immobilité complète.
Changement de rythme : mouvements de tout le corps en s’imprégnant de la musique. Quand la musique s’arrête, on ne bouge plus. Pourquoi savoir rester immobile ? Par exemple si un magicien transforme quelqu’un en statue. Ou bien, quand de nombreux acteurs sont sur scène et que l’on veut savoir ce que font deux d’entre eux : seuls ces deux-là parlent ou bougent, les autres restent immobiles ; ainsi le public comprend mieux ce qui se passe. De toute façon, rester immobile, ce n’est pas facile et cela demande à certains de l’entraînement et une sacrée maîtrise de soi !
• Les déplacements. L’enseignant poursuit : « On ne marche pas de la même façon quand on est un bébé ou un vieux monsieur, une souris ou un éléphant... » Sur une musique rythmée (par exemple, du ragtime), les enfants se déplacent en tenant compte des indications de l’enseignant ou d’un élève : « Comme un équilibriste sur un fil, comme un robot en décomposant tous les mouvements, comme un mannequin perché sur des hauts talons, comme Charlot, etc. » Entre deux démarches différentes, la musique s’interrompt et les enfants s’immobilisent.
Ensuite (toujours sur le même principe musical qu’on peut interrompre), l’enseignant raconte une histoire, par exemple : « Le petit Chaperon rouge se balade dans la forêt ; elle marche comme une petite fille... - stop - Elle aperçoit un papillon... - stop - Et là, qu’est-ce que c’est ? Une grenouille... - stop - » Et ainsi de suite jusqu’à ce que le chasseur tire et que le loup s’écroule sur le sol. L’enseignant en profite pour préciser : « Au théâtre, on fait semblant ! Si on court pour de vrai, on est déjà au bout de la rue en dix secondes. On ne peut pas vraiment courir, ce n’est pas comme au cinéma. Et quand on meurt, bien sûr on ne meurt pas réellement. Idem pour les coups de poing (dans le cadre de l’école !), et quand on tombe, on ne se fait pas mal et on ne tombe pas sur un copain ! » Les automates : en rythme, reproduire toujours les mêmes gestes. Par exemple, des musiciens ou des bricoleurs. Apprendre à décomposer les mouvements des bras, des jambes...
• Le visage. Modifier les expressions du visage en fonction de ce que l’on ressent : la joie, le chagrin, la peur, la colère, la fatigue, l’étonnement, la bouderie, la jalousie, la curiosité, l’amour, etc. Il s’agit de mime (sans bruit - ce qui n’est pas toujours facile à obtenir). En profiter pour insister sur la notion de silence (des spectateurs, des acteurs dans les coulisses, des acteurs sur scène ; mais aussi sur l’utilisation du silence lui-même, par exemple quand on fait semblant d’écouter de faibles bruits ou qu’on se déplace discrètement sur scène).
• La voix. - Articuler des mots tels que « koka koka koka » (o et a en ouvrant bien la bouche et en arrondissant le palais), tout d’abord en chuchotant, puis en parlant de plus en plus fort, sans cris aigus (ce qui est le plus difficile) et en “serrant le ventre”. Ensuite en parlant de moins en moins fort jusqu’au silence.
- Répéter des phrases en articulant, en allant de plus en plus vite... et surtout en bougeant comme les rappeurs. Au moment où les acteurs parlent sur scène, ils ont tendance à rester raides comme des poteaux ! C’est pourquoi rapper est excellent moyen de créer un automatisme. S’entraîner à articuler un passage court et simple. On “mâche” les mots, on exagère l’articulation avec une grande bouche, éventuellement devant un miroir. Lentement, puis de plus en plus vite, en rappant. Utiliser ensuite des passages plus compliqués. Les rapper de nombreuses fois de suite jusqu’à ce qu’ils coulent de source.
- Parler avec des voix et des accents différents. « On ne parle pas de la même façon quand on est un enfant, une grand-mère, un anglais, un robot ou un loup... » L’enseignant dit : « Bonjour, madame ! » (ou autre chose) en parlant successivement comme un enfant, un homme, une femme, etc. et les enfants répètent. À eux d’imiter ensuite de nouveaux personnages ou animaux. Puis chacun parle avec la “voix” qu’il a choisie. Remarque : c’est très difficile de conserver un accent ou un type de voix pendant toute une pièce.
- Autres exercices de voix : Parler en séparant toutes les syllabes ou inversement. Parler en riant, pleurant, soupirant, soufflant, chuchotant, criant, toussotant, etc. Parler seul, puis à plusieurs. Devant tout le monde, ou comme à la radio (caché). Parler avec un masque ou derrière un castelet (il faut parler fort, sans crier, pour que le public puisse entendre).
• Courtes improvisations suivies de discussions. Sur un thème donné, proposé par l’enseignant ou par un enfant : chez le médecin ou le vétérinaire, en attendant l’autobus, dans un train, dans une fusée, à l’école, dans la mer, sur la montagne, dans une forêt très sombre, etc. À partir de mots ou de phrases : chaque acteur pioche un papier sur lequel quelque chose est écrit, par exemple “vache” ou “Rira bien qui rira le dernier”.
Improvisations : soit par petits groupes, soit seul ; sans ou avec préparation (pas plus de 2 minutes). Quand il s’agit de petits groupes, chacun doit savoir ce qu’il interprète, ce qu’il va faire et dire, sinon ce sont toujours les mêmes qui parlent. Il faut aussi prévoir une chute. L’enseignant précise : « Une impro est un petite histoire très courte. On doit savoir ce qui va se passer et comment elle se termine. » Dès qu’une improvisation s’éternise, l’enseignant intervient : « Maintenant, il faudrait la chute. » À la fin d’une improvisation, les acteurs s’entraînent à se présenter en souriant, face au public, puis à saluer tous ensemble. Finir par un mini-débat permettant une prise de parole : il faut que chacun puisse exprimer “ce qui est bien... et pourquoi”, “ce qui pourrait être amélioré... et comment”. Ce mini-débat intervient à la suite de chaque improvisation, mais aussi après la mise en place d’une partie ou de l’ensemble d’une pièce.
4. Les spectacles
La bande sonore • La bande son comporte les passages musicaux, les bruitages et éventuellement les voix préenregistrées. Elle rend le spectacle beaucoup plus vivant. Il est important d’alterner passages parlés et morceaux de musique (pour déplacements, mouvements, danses...), pour plusieurs raisons : l’ensemble est plus réussi, ces morceaux de musique ou bruitages servent de plus de points de repère et de respiration (le trac diminue !) pendant le déroulement de la pièce.
• La réalisation de la bande son demande beaucoup de temps à l’enseignant. Quand il y a un problème de sonorisation (voir plus loin), il doit d’abord enregistrer les voix, en s’armant de patience. Il fait un premier essai pour voir où placer le micro afin de bien entendre l’enfant. Puis il prononce une phrase (ou un mot... pour certains acteurs qui ont énormément de mal), enregistre l’enfant qui répète la phrase (ou le mot) en question... et s’interrompt. Avec les enfants en difficulté et les enfants maîtrisant peu la lecture (sauf si le texte est très court), il n’y a pas d’autre solution. Avec de bons lecteurs qui connaissent déjà bien leurs rôles, un dialogue peut parfois être enregistré sans interruption. Mais c’est exceptionnel !
Après l’éventuel enregistrement des voix, il faut enregistrer les bruitages. Le plus simple étant d’utiliser des disques de bruitages (il en existe de très nombreux). Ensuite, l’enseignant doit faire un montage avec les bruitages et différents morceaux de musique. Par exemple, tel personnage doit traverser la salle jusqu’à la scène : il faut évaluer le temps nécessaire (ex : 10 secondes) et choisir un extrait musical correspondant au personnage en question (comment se déplace-t-il ?), à l’histoire elle-même... Pour les plus jeunes, ces morceaux de musique intermédiaires doivent être très différents les uns des autres pour être tout de suite identifiés.
Quel genre de musique utiliser ? Par exemple : - Musique classique (Mahler se prête bien aux passages angoissants ! Lully ou Corelli aux histoires de roi et reine ; Chopin aux déplacements ni trop lents ni trop rapides...) - Jazz et ragtime. - Chansons connues ou extraits de musiques de films. - Boîtes à musique. Tout dépend des CD qu’on peut emprunter ou qu’on possède. Il ne faut pas se leurrer : cela prend beaucoup de temps !
• Conseils : entre deux passages musicaux, laisser environ 3 secondes s’il s’agit d’une cassette ; plages différentes s’il s’agit d’un CD gravé. Noter sur le texte les musiques et bruitages utilisés, et les durées exactes. La personne qui va s’occuper de la bande son pendant le spectacle doit être très fiable (adulte ou enfant) : savoir exactement à quel moment appuyer sur play ou pause, être présente aux répétitions pour s’entraîner. Quand la bande sonore est prête, deux ou trois répétitions sont nécessaires avant que les acteurs ne se sentent à l’aise. Les enfants vont s’habituer peu à peu à la bande son, reconnaître les passages musicaux qui leur serviront de repères et pendant lesquels ils auront quelque chose de précis à faire (se placer à tel endroit, danser, aller dans les coulisses, prendre tel objet, avoir telle attitude, etc.) Si la bande son inclut les voix, les enfants l’écoutent plusieurs fois pour la connaître presque par cœur, tout en jouant. On est parfois surpris par la vitesse avec laquelle l’ensemble est mémorisé, même par ceux qui a priori étaient censés ne pas y parvenir. Les enfants s’entraînent à parler en même temps que la bande son. Les premières fois, ils paraissent perturbés, puis s’habituent très vite. Enfin, ils bougent, jouent réellement tout en parlant. Attention-bis : les enfants ont tendance à réciter le texte des autres acteurs ! Bien insister sur le fait que seul l’acteur concerné parle, les autres ne bougent pas les lèvres. Même si les spectateurs ne les entendent pas (la sono étant puissante), il s’agit là d’un excellent exercice d’oralisation.
Problèmes de sonorisation • Si le spectacle a lieu dans une petite salle, en présence de peu de spectateurs, les acteurs jouent en direct. Bien sûr, c’est ce qui est de loin préférable. Il est d’ailleurs important que les acteurs se rendent compte que ce n’est pas facile de se retrouver sur une scène et de parler devant un public, même indulgent. Les souffleurs sont prêts à intervenir... mais attention ! les souffleurs, même adultes, ont parfois tendance à couper la parole à l’acteur qui se retrouve bloqué. L’auteure préfère une autre solution : pendant les représentations, elle est assise par terre devant la scène ; si un enfant a le trac ou un trou de mémoire, il la regarde et elle lui souffle discrètement (un mot, une phrase ou un geste est parfois suffisant). C’est très rassurant pour les acteurs !
• Si le spectacle a lieu à l’extérieur ou dans une très grande salle (par exemple dans un énorme gymnase), devant de nombreux spectateurs, nous conseillons l’utilisation d’une bande sonore incluant les voix, réalisée par les enfants-acteurs et l’enseignant (voir précédemment). En effet, peu d’enfants ont une voix suffisamment forte pour passer la rampe. Même au collège, cette bande sonore est parfois indispensable pour les ados timides, , “mal dans leurs baskets”, en difficulté, ayant du mal à mémoriser... ou ceux dont la voix est à peine audible. Il y aura toujours ceux qui ont tout-vu-tout-dit-tout-fait et qui vous conseilleront la méthode Yaka-faukon : « Il n’y a qu’à leur apprendre à parler plus fort ! Il faut qu’on... etc. » Placer sa voix, parler assez fort sans crier : cela ne s’improvise pas. Quelquefois, il faut des années pour y parvenir.
• Reste un moyen très onéreux : l’utilisation de petits micros portables. Dans ce cas, les voix sont audibles... mais les erreurs et les trous de mémoire sont bien sûr amplifiés, ce qui n’est pas grave. Mais il peut y avoir une mauvaise surprise : un ou plusieurs micros refusant de fonctionner ! (Ça arrive !) L’utilisation de certains types de micros (suspendus, placés sur pied) n’est pas toujours au point. Méfiez-vous ! Faites des essais préalables !
Faire le point Prévoir de remplir cette liste à l’avance et de l’afficher à plusieurs endroits pour le spectacle. * Liste des acteurs et figurants (que fait chacun d’entre eux ?) * Qui est le script ? Il note au fur et à mesure des répétitions tout ce qui est nécessaire à chaque pièce (costumes, détails, accessoires, éléments de décor...), tout ce qui manque ou qu’il faut réparer, etc. * Qui est l’accessoiriste (ou les accessoiristes) dont le rôle est primordial ? Il étiquette les costumes sur les cintres (telle pièce, tel acteur). Il étiquette aussi les accessoires (tel objet, telle pièce, tel acteur) et il les dispose sur une table, sur des étagères ou dans des cartons pour les distribuer aux acteurs au fur et à mesure des interventions, ou pour que les acteurs se servent eux-mêmes s’ils en sont capables. Sinon, quelle pagaille ! Ce peut être un adulte, secondé par des enfants-accessoiristes, ou un enfant fiable. * Qui aide les acteurs à se préparer et se maquiller avant le spectacle ? * Quels sont les différents sketches et pièces présentés ? Quel est le programme (ordre des pièces - les acteurs doivent savoir après qui ils “passent“) ? Qui va préparer la feuille-programme et la distribuer ? * Quels sont les morceaux de musique utilisés ? Qui fait la “bande son“ ? * Quels sont les bruitages nécessaires ? Seront-ils enregistrés ou non ? Si non, qui sont les bruiteurs, que font-ils et à quels moments ? * Qui prépare les affiches ? Qui les met en place ? * Qui fait quoi ? Qui ouvre les rideaux ? Qui annonce les pièces successives ? * Quels sont les décors et qui les met en place ? Qui s’occupe des changements de décors, de l’installation des éléments et des accessoires ? Certains éléments (ex. une table, un panneau...) sont à installer au fur et à mesure du spectacle. * Qui appelle les acteurs et les fait entrer discrètement dans les coulisses avant le début de la pièce qui les concerne ? Qui sont les “encadreurs” chargés des divers déplacements ? Qui se trouve dans les coulisses ou dans la salle pour vérifier que les acteurs interviennent au “bon moment“... et surtout ne font pas de bruit si ce n’est pas nécessaire ? Attention : le bruit et les bavardages dans les coulisses sont difficile à maîtriser ! * Qui met la bande sonore en marche, et l’interrompt quand c’est nécessaire ? * Qui se trouve dans la salle, fait asseoir les spectateurs et leur demande de ne pas parler (hum... comme certains parents incorrigibles) ? * Et pourquoi pas... qui vaporise dans la salle un parfum en rapport avec une pièce ? Ou qui asperge légèrement le public s’il pleut ou s’il y a une tempête ? * Autres points à préciser dans le cadre de l’école : autorisations nécessaires ? Salle particulière ? Accord de la mairie pour la salle des fêtes ? Presse locale ? etc.
Nombreuses questions primordiales qui demandent des réponses claires et nettes.
Les répétitions • Répéter de longues pièces, cela est fastidieux. Donc ne pas multiplier les répétitions successives. Travailler éventuellement scène par scène, jusqu’à ce qu’elles soient au point. Répéter ensuite pièce par pièce. Quelques astuces : inviter quelques spectateurs pour certaines répétitions, cela redonne du tonus aux acteurs ! Ou filmer une ou deux répétitions avant de les regarder à la télévision. • Une répétition générale en costumes sera nécessaire avant le spectacle, pour vérifier que rien ne manque, que tout se déroule sans accrocs ou presque. La répétition générale doit avoir lieu au même endroit que le spectacle pour que les acteurs prennent leurs repères (quand ils changent d’endroit, ils sont souvent “perdus”). Ne pas oublier que les plus jeunes ont du mal à mémoriser l’ordre de passage. Entre deux pièces, le premier groupe doit retourner s’asseoir tranquillement dans la salle et le deuxième groupe (les acteurs de la pièce suivante) doit se diriger calmement vers les coulisses... pour éviter chahut et embouteillage ; on peut prévoir plusieurs adultes encadrant les divers déplacements. • Au cours des répétitions, il faut mettre au point les déplacements, corriger les erreurs, donner des conseils concrets, etc. Cela dure bien plus longtemps que la représentation elle-même. Et ne pas oublier que la plupart du temps, la répétition générale est une catastrophe... et que les spectacles sont super !
Les représentations La notion de représentation est très importante. Les acteurs ont besoin de présenter le fruit de leur travail. Ils ont quelque chose à communiquer. Ne pas passer par cette phase spectacle entraîne toujours une certaine frustration. Par ailleurs, il est nécessaire de prendre conscience de la difficulté de cette présentation. Il faut tenir compte du regard d‘autrui, de son jugement, de ses réactions. Il faut maîtriser le trac, l’angoisse (utiliser la respiration, la relaxation, même debout sur scène)... et pour cela s’entraider, car tous les acteurs sont dans le même cas, même si certains sont plus inquiets, plus impressionnables que d’autres.
Une ou plusieurs représentations ? À vous de choisir ! Il est vrai que préparer un spectacle demande énormément de travail. On a souvent envie de présenter plusieurs fois le résultat : à d’autres classes, d’autres écoles, aux familles, au club de personnes âgées... Parfois, des collégiens ou des élèves de CM montent de grands spectacles et ils invitent les écoles de la ville à plusieurs représentations successives.
Un dernier conseil : n’oubliez pas les appareils photos (batteries rechargées), au besoin les caméras ! L’organisateur ne peut se charger de prendre des photos et de filmer ; il a autre chose à penser. Demandez à certains parents de s’en occuper, mais placez-les assis par terre devant pour éviter les files de têtes qui coupent toutes les images. Même dans le cadre des répétitions, les enfants-acteurs progressent beaucoup quand ils peuvent se voir à la télévision, en relevant “ce qui est bien” et “ce qui peut être amélioré”.
Si vous avez besoin de conseils supplémentaires concernant la mise en scène, les décors, le travail théâtral, les passages musicaux, etc., n’hésitez pas à écrire à l’auteure des pièces qui donne des cours de théâtre à des enfants de maternelle, élémentaire, collège et lycée depuis 1976 : annrocard@wanadoo.fr
Date de création : 16/03/2016 : 17:28
Dernière modification : 04/06/2016 : 10:59
Catégorie : Théâtre à lire et à jouer
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