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(4-8 ans) Le dragon a la tremblote (Histoires (enfants))
LE DRAGON A LA TREMBLOTE
Ann Rocard
Histoire parue dans des livres qui ne sont plus disponibles.
Aujourd’hui, il fait une chaleur terrible.
Les habitants de Grenouille-ville prennent leurs maillots de bain
et courent jusqu’au lac Plic-Plac.
C’est là que vit l’affreux dragon Mirliton...
mais personne ne le sait.
Mirliton habite depuis des années dans une grotte sombre.
Il est atroce, féroce et couvert de bosses.
Il ne rêve que de cabosse.
De temps en temps, il attrape un pêcheur
ou un baigneur sur les rives du lac.
Il l’emporte au fond de sa grotte
et l’on n’en entend plus jamais parler.
Ce matin, le dragon se réveille en sursaut :
« Mirontontaine et mirontonton !
J’entends du bruit. »
Il jette un coup d’œil au-dehors
et il aperçoit des danseurs, des baigneurs,
des pêcheurs de tous les côtés.
Alors il frotte son énorme ventre rond,
il claque ses mâchoires puissantes
et il se met à ricaner :
« Eh, eh, eh, parole de dragon !
Mon déjeuner est tout trouvé ! »
Il enfile un large tee-shirt,
il prend un grand sac et sort de la grotte.
Sur les rives du lac Plic-Plac,
les baigneurs et les pêcheurs ne se rendent compte de rien.
Ils chantent et dansent.
Ils s’éclaboussent ou ils s’allongent sur la mousse et le sable doré.
Soudain, la petite Elodie lève la tête.
Et que voit-elle derrière les buissons ?
Le terrible Mirliton !
« Regardez ! Regardez ! crie Elodie. Un dragon !
— Un dragon ? s’étonnent les baigneurs.
— Il est atroce, féroce et couvert de bosses, ajoute Elodie.
— Il est atroce, féroce et couvert de bosses »,
répètent les pêcheurs terrifiés.
Elodie a raison.
Les habitants de Grenouille-ville aperçoivent
l’affreux dragon qui ricane au bord du lac :
« Eh, eh, eh ! Atroce, féroce, couvert de bosses...
et je ne rêve que de cabosse, cabosse, cabosse ! »
Aussitôt, les baigneurs, les pêcheurs, les danseurs,
les chanteurs s’enfuient à toute vitesse :
ils grimpent en haut des arbres,
ils plongent au fond de l’eau,
sous les taillis ou derrière les rochers.
Mais Mirliton les trouve tous, les uns après les autres,
et il les met dans son grand sac.
Tous ? Non... car Elodie est toujours là,
cachée parmi les fleurs de toutes les couleurs.
La petite fille ne sait pas comment délivrer les prisonniers.
Pour l’instant, elle préfère attendre sans bouger.
Quand Mirliton a attrapé tous les habitants de Grenouille-ville,
il pose son sac bien fermé et il se couche au bord du lac :
« Mirontontaine et mirontonton !
Je vais me reposer un peu avant de déjeuner. »
L’affreux dragon ferme les yeux
et commence à ronfler : RRRON RRRON...
Elodie écarte doucement les fleurs.
Elle sort de sa cachette
et elle s’approche sur la pointe des pieds.
Chut ! D’abord, elle ouvre le grand sac
et elle fait signe aux prisonniers de la suivre sans bruit.
Puis elle cueille un peu de poil à gratter
sur une branche d’églantier
et elle le glisse dans le tee-shirt du dragon,
avant de retourner se cacher.
Peu après, le terrible Mirliton ouvre les yeux.
Il se lève d’un bond car quelque chose le gêne :
« Mirontontaine et mirontonton !
Ça me grattouille ! Ça me gribouille ! Ça me chatouille ! »
Sur les rives du lac Plic-Plac,
le dragon se met à trembler, bouger, gesticuler,
se gratter, se gratter, se gratter.
Il ne pense plus à ses prisonniers,
il ne pense plus à son déjeuner.
Il a presque tout oublié.
Alors Elodie et les danseurs, les baigneurs, les pêcheurs
s’écrient dans un grand éclat de rire :
« Le dragon a la tremblote !
Le dragon a la tremblote !
Il est atroce, féroce et couvert de bosses.
Mais il ne rêve plus de cabosse ! »
Abandonnant l’affreux Mirliton,
tous s’éloignent vers Grenouille-ville
en applaudissant Elodie qui leur a sauvé la vie.