PARTIE DE CARTES
Ann Rocard
Florian passait les vacances chez son grand-père. Cet après-midi-là, il traversait un petit bois où il venait de construire une cabane, quand l’orage éclata. Les éclairs zébraient le ciel noir ; une pluie glaciale le cinglait au visage.
Vite trempé, Florian s’inquiéta : « Papy m’a dit de ne jamais rester sous un arbre pendant un orage. »
Il aperçut la silhouette d’une bicoque qu’il n’avait jamais remarquée. Une bicoque biscornue dont les fenêtres étaient vaguement éclairées. « Enfin un abri ! » s’écria-t-il, et il courut frapper à la fenêtre. « Ohé ! Il y a quelqu’un ? » Seul le tonnerre lui répondit.
Il tourna la poignée en cuivre... Hiiiiiiiiiiiii... La porte grinça sur ses gonds. Il pénétra dans une pièce sombre où vacillait un point de lumière. Une pièce lugubre qui sentait le renfermé. Soudain, un coup de vent fit claquer la porte d’entrée. « Pas question de rester dans un endroit pareil », sursauta Florian, la gorge nouée. Il saisit la poignée... Impossible d’ouvrir ! Au même instant, il entendit une voix grave lui ordonner : « Approche ! » Florian se retourna, ne pouvant s’empêcher de trembler. « Approche ! répéta la voix. Tu n’as rien à craindre. »
Il se dirigea à pas lents vers le point de lumière. Trois personnes étaient assises autour d’une table, éclairée par une bougie, et elles jouaient aux cartes, un verre à la main. « Bonbon... Bonjour. — Qu’a-t-il de bon, ce jour ? C’est un vendredi 13, voilà tout, grogna l’homme, vêtu comme... — Nana Napopo... — Cesse de bafouiller, ordonna l’homme. Tu m’agaces. Eh, oui, Napoléon, c’est moi. Le vrai, l’unique. Me prendrais-tu pour une imitation ? » Florian se frotta les yeux. « Joins-toi à nous, par Toutatis ! gloussa son voisin en caressant ses moustaches rousses. — Un Gaugau... Un Gaulois... Un revenant ? bredouilla Florian, persuadé qu’il était en train de rêver et qu’il n’allait pas tarder à se réveiller. — Exactement : un revenant ! Tu n’en reviens pas ? »
Florian s’immobilisa : Vercingétorix, en chair et en os, lui tendait un verre de coca. Quant au troisième homme, il saisit sa tête d’un vert fluorescent et la posa sur la table. Le Gaulois expliqua aussitôt : « Ne fais pas attention. Notre copain Louis a un tic depuis la Révolution. »
AAAH ! Florian poussa un hurlement et tomba à la renverse. Napoléon lui montra la porte : « Si tu souhaites t’en aller, l’orage est fini. N’hésite pas à venir nous voir chaque vendredi 13. » Il lui glissa une carte dans la poche avant d’ajouter : « Mais tiens-toi à carreau ! »
Sans demander son reste, Florian se précipita vers la porte qui s’ouvrit. À quelques mètres de la bicoque, il se retourna... Elle avait disparu ! Et il poussa un long soupir : « Ouf... Ce n’était qu’un cauchemar... » Il tâta alors sa poche et en retira une carte : un as de carreau !
Vos illustrations seront les bienvenues !
Date de création : 17/05/2011 : 23:04
Dernière modification : 20/12/2012 : 10:05
Catégorie : Nouvelles (ados-préados)
Page lue 9673 fois
|