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Contes traditionnels (faciles) : La reine des neiges

LA REINE DES NEIGES

raconté par Ann Rocard



Envoyez-moi vos illustrations en précisant les noms et adresses de l'école


Le diable fabriqua un terrible miroir qui rendait laid tout ce qui était beau et bon.
Mais celui-ci glissa et vint s'écraser sur la Terre
où il explosa en milliards de petits morceaux, emportés par le vent.
Si une poussière du miroir venait se loger dans le cœur de quelqu'un,
ce cœur devenait mauvais et froid comme un bloc de glace...
Et si un grain de poussière se glissait dans son œil, tout lui paraissait affreux et déformé.


Dans une grande ville vivaient Kay et Gerda, deux amis inséparables.
Un soir, Kay s'écria :
« Aïe ! Ça m'a piqué l'œil et le cœur. »

C'était de la poussière de verre du miroir diabolique.


À partir de ce jour-là, Kay changea.
Il arrachait les fleurs, se moquait des passants et même de Gerda.

Un matin d'hiver, Kay jouait sur la grand-place,
quand arriva la reine des neiges, assise dans un traîneau blanc.
Elle embrassa Kay sur le front.
Le petit garçon oublia Gerda et tout ce qui avait été sa vie,
et il suivit le reine des neiges.
Les flocons blancs tourbillonnaient et le traîneau quitta la ville.


Gerda était terriblement inquiète : où était donc Kay ? S'était-il noyé comme on le prétendait ?
Au printemps suivant, la petite fille partit à la recherche de son ami disparu.


Des jours et des semaines s'écoulèrent.
Les feuilles s'envolèrent et le brouillard recouvrit la campagne.

Gerda était épuisée d'avoir tant marché.
Devant elle, une grande corneille sautilla sur la neige,
et la petite fille l'interrogea :
« As-tu vu mon ami Kay ?
— Oui, je crois qu'il habite près d'ici, chez une princesse. »

La nuit suivante, l'oiseau noir guida Gerda jusqu'à la chambre de la princesse.
Hélas, le jeune garçon qui dormait dans la même chambre que la princesse n'était pas Kay,
mais un petit prince, jeune et beau.

Le prince et la princesse offrirent à Gerda des vêtements, des serviteurs, un carrosse d'or...
Et la petite fille poursuivit son voyage.

Le carrosse brillant traversa une sombre forêt.
« De l'or ! » crièrent des brigands
qui arrêtèrent les chevaux, massacrèrent les serviteurs et jetèrent Gerda sur le sol.
« Elle sera mon amie », décida la fille du chef des brigands
qui obtenait tout ce qu'elle voulait.

La fille du chef s'installa dans le carrosse,
et Gerda lui raconta son histoire.

Au coucher du soleil, le carrosse s'arrêta dans la cour d'un vieux château.
Les deux fillettes se couchèrent dans un coin.
Au-dessus de leurs têtes, des pigeons étaient enfermés dans une cage.
Près du mur était attaché un renne qui tremblait de peur.

Pendant la nuit, les pigeons roucoulèrent :
« Rou, rou... Nous avons vu le petit Kay.
Il était dans le traîneau de la reine des neiges qui survolait la forêt.
— Le palais de la reine se trouve près du pôle Nord, murmura le renne.
— Quand mon père et ses hommes quitteront le château,
mon renne te conduira là-bas », proposa la fille de brigand.


Ainsi fut fait.
Le renne s'éloigna du château, emportant Gerda sur son dos.
Il courut nuit et jour, traversa la Finlande
et s'arrêta enfin devant la maison d'une Finnoise qui vivait non loin du pôle Nord.
« Celui que vous cherchez habite chez la reine des neiges, expliqua la Finnoise.
Il a reçu de la poussière de verre dans l'œil et dans le cœur.
Il faut l'en débarrasser, sinon la reine conservera son pouvoir sur lui.
Allez-y ! Le jardin du palais est tout près d'ici. »

Peu après, le renne déposa Gerda dans la neige, à l'entrée du jardin, et il fit demi-tour.

Il faisait terriblement froid.
La petite fille courut en direction d'un grand palais de neige.
Dans une immense salle glacée s'étendait un lac gelé,
et au milieu du lac se trouvait le trône de la reine.
Kay était assis à ses pieds.

Le jeune garçon était bleu de froid ; il ne s'en rendait même pas compte.
Il passait ses journées à assembler des morceaux de glace.
La reine lui avait promis qu'il serait libre quand il pourrait tracer le mot "Éternité"...

Ce jour-là, la reine des neiges annonça :
« Je pars vers les pays chauds. Je reviendrai bientôt. »

La reine s'éloigna, et Kay demeura seul. Il paraissait mort de froid.
Au même instant, Gerda entra dans le palais.
Elle aperçut son ami et lui sauta au cou en criant :
« Kay ! Je t'ai enfin retrouvé ! »

Hélas, Kay ne bougeait pas.
Alors Gerda pleura à chaudes larmes, et ces larmes tombèrent sur le corps du jeune garçon.
Elles glissèrent jusqu'à son cœur, firent fondre le bloc de glace et entraînèrent la poussière de verre.

Kay regarda Gerda et, lui aussi, se mit à pleurer.
Il pleura tant que la poussière de verre sortit de ses yeux et qu'il reconnut la petite fille :
« Gerda ! Où étais-tu ? Oh, comme il fait froid ici ! »

Les deux enfants s'embrassèrent.
Autour d'eux, les morceaux de glace se mirent à danser et formèrent le mot "Éternité".
Kay était libre.
La reine des neiges ne pourrait plus le retenir
et la poussière diabolique avait disparu à jamais.


Gerda et Kay sortirent du château, main dans la main.
Ils marchèrent longtemps, longtemps...
Quand ils arrivèrent chez eux, les cloches sonnaient à toutes volées, les rosiers fleurissaient...
et au moment où ils franchirent les portes de la ville,
ils s'aperçurent qu'ils étaient devenus des grandes personnes.